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Les lettres du dernier prophète de l'islam (ﷺ) aux empereurs
1. L’année des lettres
Vers l’an 6 de l’Hégire (627-628 de l’ère chrétienne), après la trêve de Hudaybiyya avec les Quraysh, le Prophète Muhammad (ﷺ) entame une phase nouvelle : celle de l’ouverture diplomatique. La communauté musulmane de Médine est plus stable, il envoie des lettres officielles à plusieurs souverains de la région, musulmans ou non.
Ces lettres sont adressées à des dirigeants majeurs du monde antique :
Héraclius, empereur byzantin (chrétien),
Khosro II, empereur sassanide (zoroastrien),
le Négus d’Abyssinie, déjà favorable,
al-Muqawqis, gouverneur copte d’Égypte,
le roi de Bahreïn, le gouverneur de Damas, et d’autres chefs tribaux arabes.
2. Une diplomatie religieuse
Ces lettres ne sont pas des déclarations de guerre ni des injonctions de conversion par la force. Ce sont des invitations à reconnaître le message monothéiste de l’islam, formulées dans un ton respectueux, avec des références scripturaires communes.
La structure typique des lettres commence par :
"Au nom de Dieu, le Clément, le Miséricordieux. De Muhammad, serviteur de Dieu et son Messager..."
Puis :
"Paix à celui qui suit la guidée..."
Elles appellent souvent à "une parole commune" entre croyants, référence explicite à Sourate 3, verset 64 :
(Traduction approximative de la sourate Al Imran, 3:64)
"Ô gens du Livre, venez à une parole équitable entre nous et vous : que nous n’adorions qu’Allah, sans rien lui associer..."
Aucun passage n’ordonne une soumission politique ou une conversion forcée. Il s’agit plutôt d’établir un lien entre croyants monothéistes, dans une perspective d’universalité.
3. Réactions contrastées des destinataires
Les lettres envoyées par le Prophète Muhammad (ﷺ) ont suscité des réactions variées, allant de la curiosité bienveillante au rejet catégorique. Les sources musulmanes – notamment Ibn Ishaq, al-Ṭabarī, al-Bukhārī et Ibn Sa‘d – rapportent avec détail ces épisodes, sans forcément embellir les refus. Voici un aperçu des cas les plus notables :
Héraclius (empereur byzantin, chrétien)
Selon un récit transmis par al-Bukhārī, Héraclius aurait lu la lettre avec attention à Jérusalem, après une victoire contre les Perses. Il convoque alors des marchands arabes, dont Abū Sufyān, pour interroger sur Muhammad. Impressionné par les réponses, il aurait déclaré :
"S’il est vrai ce que vous dites, alors il régnera sur cette terre qui est sous mes pieds."
Il ne se convertit pas, mais manifeste du respect. Certains récits suggèrent qu’il fut tenté par l’islam, mais craignit la réaction de son peuple — une hypothèse controversée chez les historiens.
Al-Muqawqis (gouverneur d’Égypte, chrétien copte)
Il répond à la lettre avec respect mais n’embrasse pas l’islam. Il envoie en retour des cadeaux, dont Maria al-Qibtiyya, qui deviendra l’épouse du Prophète et mère de son fils Ibrāhīm. Sa réponse polie est vue comme un signe d'ouverture sans engagement religieux.
Khosro II (roi sassanide, zoroastrien)
Réaction hostile. Selon al-Ṭabarī, Khosro II déchire la lettre, outré par le ton qu’il juge égalitaire, voire offensant. Le Prophète, en apprenant cela, aurait dit :
"Dieu déchirera son royaume comme il a déchiré ma lettre."
Ce que certains musulmans ont interprété comme une prophétie, réalisée quelques années plus tard avec la chute des Sassanides.
Le Négus d’Abyssinie (roi chrétien)
Ayant déjà accueilli les premiers musulmans exilés en 615, le Négus reçoit la lettre favorablement. Il envoie des présents et confirme son appui. Des traditions musulmanes avancent qu’il aurait accepté l’islam en privé. Le Prophète célèbre sa mort par une prière funéraire à distance – un geste unique envers un roi non arabe.
Roitelets arabes locaux
Des souverains comme al-Hārith ibn Abī Shamir (Ghassanide) ou al-Mundhir ibn Sāwā (Bahreïn) répondent de manière diverse : certains s’engagent, d’autres ignorent ou rejettent l’appel. La réception dépend du contexte géopolitique local et des alliances en jeu.
4. Comment les historiens modernes évaluent ces lettres ?
Les chercheurs modernes — musulmans ou non — s’accordent sur l’importance historique de ces lettres comme premiers actes de diplomatie religieuse interétatique de l’islam naissant. Mais leur authenticité textuelle et leur interprétation sont traitées avec nuance.
Sur l’authenticité historique
Le contenu de ces lettres est transmis dans des sources classiques musulmanes : Sīra d’Ibn Ishaq (via Ibn Hishām), Tārīkh d’al-Ṭabarī, recueil de Sahih al-Bukhārī (notamment le récit long sur Héraclius), et d’autres.
Plusieurs lettres (ou des copies présumées) sont conservées dans des musées, comme celle à Héraclius au musée Topkapi (Istanbul), mais leur authenticité matérielle est contestée (absence de manuscrits contemporains).
Le consensus chez les historiens critiques (ex. Montgomery Watt, R. B. Serjeant, Fred Donner) est que :
les lettres sont historiquement plausibles dans leur ensemble,
elles reflètent un tournant réel dans la stratégie du Prophète,
mais certaines formulations peuvent avoir été réécrites ou idéalisées a posteriori par la tradition musulmane.
Ce qu’en disent quelques auteurs clés
W. Montgomery Watt, dans Muhammad at Medina, juge les lettres "probablement authentiques quant à leur existence", même si "leur contenu exact ne peut être assuré."
Fred M. Donner, dans Muhammad and the Believers, voit ces lettres comme le signe d’une vision universaliste du message prophétique, en lien avec la constitution d’une communauté croyante transnationale.
R. B. Serjeant considère que la démarche diplomatique du Prophète correspond aux usages épistolaires et protocolaires de l’époque.
Des historiens comme Patricia Crone sont plus sceptiques, mais ne nient pas l’existence d’échanges diplomatiques interconfessionnels vers la fin de la vie du Prophète.
4. Des lettres conservées ou reconstruites ?
L’authenticité de ces lettres fait l’objet de débats parmi les historiens.
Les textes de ces lettres nous sont transmis dans les biographies prophétiques classiques (Sīra d’Ibn Ishaq, Ibn Hishām, al-Ṭabarī) et dans certains recueils de hadiths, notamment chez al-Bukhārī.
Des copies prétendument anciennes ont été préservées dans des archives musulmanes, comme celle envoyée à Héraclius, visible dans le musée Topkapi à Istanbul. Mais leur authenticité matérielle reste incertaine, faute de documents contemporains directement datés.
Néanmoins, la cohérence entre les différentes versions et leur caractère non apologétique (certains refusent ou restent sceptiques) les rendent historiquement plausibles, même selon des chercheurs non musulmans comme Montgomery Watt et Fred Donner.
Ces lettres sont interprétées par les chercheurs modernes comme un tournant dans l’auto-perception du Prophète : non plus seulement leader local, mais messager universel.
5. Un geste de reconnaissance mutuelle, pas de domination
Ce que ces lettres révèlent, c’est une volonté d’établir des ponts entre croyants du Livre, dans un esprit de dialogue, et non d’annexion religieuse ou politique. Muhammad se présente comme le dernier maillon d’une chaîne prophétique, tout en reconnaissant la dignité de ses interlocuteurs.
Il ne condamne pas les traditions antérieures : il les appelle à se reconnecter à leur source monothéiste. Et surtout, il parle dans leur langage religieux, sans violence, ni injonction impériale.
Conclusion :
À travers ses lettres, le Prophète Muhammad (sws) manifeste une vision ouverte, universelle et interreligieuse de sa mission. Ces messages sont des tentatives diplomatiques, mais aussi spirituelles, pour établir un terrain commun avec les autres grandes civilisations monothéistes de son temps.
Dans une époque où le dialogue entre croyants semble souvent rompu, ces lettres rappellent que l’islam des origines s’adressait aux autres traditions avec respect, argument et reconnaissance.
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